Sahara occidental : tractations discrètes entre Washington, Rabat et Alger autour du plan d’autonomie marocain

Alors que le Conseil de sécurité de l’ONU doit se prononcer en octobre sur le renouvellement de la mission au Sahara occidental (Minurso), les tractations diplomatiques se multiplient autour du plan d’autonomie proposé par Rabat.
En tournée en Afrique du Nord fin juillet, Massad Boulos, conseiller Afrique de Donald Trump, a placé le dossier saharien au cœur de ses discussions. Après Paris, où il a rencontré le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot, l’émissaire américain s’est rendu à Alger, évitant soigneusement Rabat mais réaffirmant le soutien de Washington au plan d’autonomie marocain. Les États-Unis, épaulés par la France et le Royaume-Uni, espèrent obtenir en octobre l’adoption d’une résolution du Conseil de sécurité qui consacrerait ce plan comme seule base de règlement, écartant ainsi toute référence à un référendum.
Un plan remanié et soutenu par Paris
Selon Africa Intelligence, à Rabat, les conseillers de Mohammed VI et le ministre des affaires étrangères Nasser Bourita travaillent à une version actualisée du projet présenté en 2007. Cette révision avait déjà été au menu de la visite d’Emmanuel Macron au Maroc en octobre 2024. Le déplacement prochain de Bourita à Paris devrait permettre d’en peaufiner les détails.
Les équilibres au Conseil de sécurité
Pour être adoptée, la résolution devra obtenir au moins neuf voix favorables sans veto d’un membre permanent. En 2025, l’Algérie fait partie des membres non permanents, aux côtés notamment de la Corée du Sud, du Pakistan et de la Slovénie, des pays que Rabat tente activement de convaincre.
A en croire la même source, une adoption signifierait la fin du rôle actuel de la Minurso, réduite à une simple mission d’accompagnement du processus d’autonomie.
L’Algérie reste inflexible

Alger, qui accueille des dizaines de milliers de réfugiés sahraouis à Tindouf, continue de défendre l’autodétermination et soutient fermement le Front Polisario. Malgré les discussions de Massad Boulos avec le président Abdelmadjid Tebboune, aucune ouverture officielle n’a été annoncée. C’est la République arabe sahraouie démocratique (RASD) qui a réagi, dénonçant la position marocaine.
Dans son discours de la fête du Trône le 29 juillet, Mohammed VI a pourtant insisté sur la nécessité d’une « solution consensuelle » avec l’Algérie, sans vainqueur ni vaincu.
Washington entre pression et conciliation
Les États-Unis envisagent plusieurs leviers vis-à-vis d’Alger. Un projet de loi porté par le républicain Joe Wilson propose de classer le Polisario comme organisation terroriste, ce qui permettrait de sanctionner l’Algérie. Mais pour l’heure, Washington privilégie la diplomatie, misant sur les investissements énergétiques de Chevron en Algérie et sur une relecture du plan d’autonomie qui prendrait en compte certaines exigences algériennes.
Le risque du fait accompli
Le plan marocain de 2007 évoquait une « libre consultation référendaire », mais sans préciser ni les modalités ni la date. Pour Alger et le Polisario, Rabat pourrait chercher à consolider sa souveraineté avant toute consultation, créant ainsi un fait accompli. Le développement économique du Sahara occidental, avec notamment la construction du port de Dakhla-Atlantique, constitue l’argument central du Maroc pour rallier la population locale.
À plus long terme, Rabat souhaite que l’ONU retire le Sahara occidental de la liste des territoires à décoloniser du Comité spécial des 24. Mais la présence en son sein de pays comme la Syrie, l’Iran ou la Chine rend cette perspective encore lointaine.
Rustine De Gloire