
L’Algérie envisage de reprendre la villa des Oliviers, résidence historique des ambassadeurs de France à Alger. Cette bâtisse emblématique, qui offre une vue imprenable sur la baie d’Alger, est au cœur d’une nouvelle tension diplomatique entre Paris et Alger. Le gouvernement algérien étudie la possibilité de mettre fin au bail qui permet à la France d’en disposer, une question débattue lors d’une réunion du Haut Conseil de sécurité (HCS) le 27 février, sous la présidence d’Abdelmadjid Tebboune, en présence du chef d’état-major Saïd Chengriha.
Cette annonce survient dans un climat diplomatique déjà tendu. La veille, le Comité interministériel de contrôle de l’immigration (Cici) s’était réuni à Matignon sous l’égide du premier ministre français François Bayrou. Accompagné du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, il avait menacé de revoir entièrement les accords de 1968 régissant les conditions de circulation, de séjour et de travail des Algériens en France. En réponse, Alger a averti qu’une telle révision entraînerait une riposte proportionnelle sur d’autres accords bilatéraux, y compris ceux relatifs aux biens immobiliers occupés par la France en Algérie.
La villa des Oliviers appartient à l’État algérien mais est louée par la France depuis 1963 sous un bail emphytéotique de soixante ans, arrivé à échéance en 2023. Lors de sa visite en Algérie en août 2022, Emmanuel Macron avait abordé la question avec Abdelmadjid Tebboune. Ce dernier avait alors donné son accord oral pour prolonger l’usage de la villa par la France, mais aucun document officiel n’a été signé, laissant la situation dans un flou juridique.

Selon Africa Intelligence, cette demeure historique a accueilli plusieurs figures majeures durant la Seconde Guerre mondiale, notamment les généraux Alphonse Juin et Charles de Gaulle. Son importance symbolique dépasse le simple cadre diplomatique, ce qui explique pourquoi sa restitution éventuelle à l’Algérie suscite de vives réactions. Alger semble vouloir rappeler que les concessions faites ok dans le passé ne sont pas gravées dans le marbre et qu’elles peuvent être remises en cause en fonction du contexte géopolitique.
L’agence de presse officielle Algérie Presse Service (APS) a rapporté, le 16 mars, que le ministère algérien des Affaires étrangères avait récemment convoqué l’ambassadeur de France, Stéphane Romatet, pour aborder le dossier des biens immobiliers mis à la disposition de la France. Cette convocation, qui marque un durcissement du ton algérien, s’inscrit dans une volonté plus large de réévaluer les relations entre les deux pays, notamment sur le plan diplomatique et économique.
Depuis que la France a modifié sa position sur le Sahara occidental, les tensions entre Paris et Alger ne cessent de s’aggraver. Après les restrictions imposées à l’enseignement du français et les crispations sur la coopération migratoire, la question des biens immobiliers semble devenir un nouveau levier de pression dans ce bras de fer entre les deux nations. L’Algérie, en reprenant possession de la villa des Oliviers, pourrait bien envoyer un message clair sur sa volonté de redéfinir les termes de sa relation avec l’ancienne puissance coloniale.
Juslie Lebongui