En pleine crise sécuritaire avec la rébellion du M23, le président congolais Félix Tshisekedi a réorganisé son cabinet tout récemment, maintenant la plupart de ses collaborateurs mais écartant son influent ambassadeur itinérant, Dany Banza. Chargé de l’intégration régionale, ce dernier était une figure clé du pouvoir dans l’ex-Grand Katanga. Cette éviction marque la fin d’une relation qui s’était détériorée au fil des mois, notamment sur la question d’une éventuelle révision constitutionnelle pouvant ouvrir la voie à un troisième mandat pour Tshisekedi.
Les tensions entre les deux hommes remontent à plusieurs mois, mais elles ont culminé en novembre 2024, lorsque le président a évoqué cette réforme lors d’un meeting à Lubumbashi. Dany Banza, qui s’était déjà opposé à une manœuvre similaire sous Joseph Kabila, n’a pas caché son désaccord. Ancien membre du “G7”, groupe de dissidents de l’ère Kabila, il a toujours combattu toute tentative de prolongation du pouvoir au-delà des limites constitutionnelles.
Malgré des tentatives de réconciliation, notamment par l’ex-conseiller privé Fortunat Biselele, Dany Banza n’est pas retourné en RDC depuis plusieurs mois. Son absence a nourri les critiques de ses opposants, qui ont mis en avant son lien familial avec l’ex-général John Numbi, un ancien proche de Kabila soupçonné de fomenter une rébellion contre Kinshasa. Ce contexte explosif a fini par convaincre le président de prendre ses distances avec son ancien allié.
Ce départ pourrait toutefois fragiliser Tshisekedi dans l’ex-Grand Katanga, région stratégique et riche en ressources minières. Avec l’avancée du M23 et les tensions locales, l’absence de Dany Banza risque d’attiser la méfiance des notables et de la société civile locale, qui accusent déjà le pouvoir central de piller les richesses minières au profit de l’élite politique kasaïenne. Une situation qui pourrait accentuer l’instabilité à un moment critique.
Pour compenser cette perte, Tshisekedi compte désormais sur sa belle-sœur Isabelle Kibassa, récemment nommée à son cabinet. Ancienne députée provinciale belge, elle avait tenté sans succès de s’imposer en 2023 à la tête du Lualaba, une province clé de l’ex-Grand Katanga. Reste à savoir si elle pourra s’imposer dans une région où l’influence de Dany Banza reste forte et où la défiance envers Kinshasa ne cesse de croître.
Rustine De Gloire